Claire est la générosité même. Elle m’a ouvert en grand sa maison, un peu bordélique il est vrai, son frigo et son garde-manger. Pourtant, au cours du souper qu’elle nous a préparé, elle ne cache pas qu’elle m’héberge ce soir, du même que Guillaume, un jeune camionneur d’Agen, pour pouvoir payer son loyer. Mais décidément, la politique autoritaire du gouvernement Macron pour « faire la guerre » au COVID a laissé des traces. Et Claire, psychomotricienne dans une crèche reste profondément révoltée d’avoir été exclue de son travail pendant 15 mois pour refus de vaccination.
Heureusement, je suis parvenu à lui faire parler d’autres choses en évitant de lui avouer que j’étais médecin, responsable de centres de vaccination , et en l’orientant vers ses difficultés d’intégration dans cette région. Elle qui vient de Lyon, a été étonnée d’apprendre que quelques familles possèdent l’immense majorité des terres landaises. Il règne une véritable omerta au sujet de la valeur de vente du bois de pin. Cette forêt couvre 1,8 millions d’hectares ! 
Le petit vent froid en profite pour me mordre les doigts et le nez tant que le soleil se cache derrière les grands arbres. Le trajet aurait pu suivre sur une bonne vingtaine de kilomètres cette départementale 140 rectiligne. 
Mais les baliseurs du coin ont eu la bonne idée de nous la faire quitter de temps en temps pour retrouver des chemins sablonneux et un décor un peu différent, quitte à rallonger le parcours de quelques kilomètres. 


Ce trajet dans les Landes ressemble quand même un peu à ce que je craignais. Par contre, la qualité de mes rencontres avec les hébergeur de cette région ont dépassé mes espoirs. 
Par moments je retrouve la route et ses « dangers ».


Les noms des lieux-dits Tireveste et, à côté, Tiregilet feraient allusion à des endroits où on détroussait les pèlerins.
Voici, à mi-chemin, le village de Lespéron et j’espérons bien pouvoir m’y arrêter et je rêvons même d’y trouver un café crème.

C’est mon jour de chance !
La maison de la gemme. La gemme est la résine de pin qui était récoltée par ici pour en tirer la térébenthine. Elle était utilisée dans la fabrication des vernis, des peintures, des parfums et dans l’industrie pharmaceutique. 
En sortant du village, une bande de cueilleurs, champignons, bien chargé de récolte, me salue joyeusement.
La suite de la balade ? Comment t’expliquer sans me répéter ? On est dans les Landes, quoi …

Ah oui, avant Taller, j’ai croisé l’autoroute A63, j’ai pris un tournant à gauche et exactement un à droite. J’en ai la tête qui tourne !


Et juste après ce dernier virage, un petit vallon avec une plaque explicative. Ici a eu lieu la bataille de Taller. Ah bon? Jamais entendu parler. En 982 le Duc Sanche de Gascogne y a battu les Vikings et tué leur chef Harald. La bataille fut terrible, les morts innombrables. Et pendant longtemps leurs os jonchèrent la plaine précise un texte de l’époque. 

En mémoire du frère du duc, un évêque mort durant ce combat, Saint Louis ordonne la construction d’une chapelle et d’un prieuré pour y accueillir les pèlerins, il était défendu par l’ordre des Chevaliers de Saint Jacques. 
Difficile de se représenter tout cela dans cet environnement paisible et envahi depuis par cette forêt de pins.

Il y a longtemps que je n’ai plus rencontré de jacquet, et celui-ci est tout petit.
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