Après une nuit orageuse, il ne pleut presque plus ce matin. J’avais planifié de faire étape aujourd’hui à Saint-Sauvant dans une vingtaine de kilomètres. Je ne sais pas ce qui s’y passe mais impossible d’y trouver un lit disponible parmi la vingt-deux que proposent théoriquement les gîtes et chambres d’hôtes de la commune. Il me faudra pousser jusqu’à la suivante, Chenay.
Lusignan est actuellement une petite cité de caractère. Mais elle fut au Moyen Âge, le berceau de la Maison de Lusignan qui a donné des seigneurs parmi les plus puissants de l’époque, dont un roi de Chypre, un roi d’Arménie, et même le dernier roi de Jérusalem. Quel chemin ils ont parcouru depuis ici! 
La cité était alors  dominée par un des plus importants châteaux de France.  Pendant les guerres de religion, il est devenu une solide, place forte protestante et il fut complètement rasé par les catholiques après leur conquête. À part une esplanade, plus rien à voir de cette forteresse bâtie, selon la légende, avec l’aide de la fée Mélusine.
Lorsque j’arrive à la halle, elle est remplie d’un grand brouhaha et et d’un rassemblement de scouts, visiblement très catholique, avec leur béret et leurs oriflammes.
Avant leur messe, j’ai juste un petit quart d’heure pour visiter la très belle église Saint Junien. Elle a été construite en 1025. Elle fête donc son premier millénaire !
À la sortie du village, Jean-Claude abandonne son potager pour venir à ma rencontre. Cela fait des années qu’il voit passer des randonneurs et en me voyant, il s’est décidé à me demander quelques renseignements sur le chemin de Compostelle. Effrayé par la distance que je dois encore parcourir aujourd’hui, 20 km, il propose de me conduire. Merci, Jean-Claude, mais je si je suis ici, c’est pour marcher, justement.D’autant plus que le soleil a fait un retour inespéré. Aujourd’hui j’ai opté pour l’itinéraire cycliste, qui se passe sur du dur, plutôt que de patauger dans la boue et les flaques provoquées par les pluies intenses de cette nuit. 
Au loin, je perçois des détonations, il n’y a pas que les pèlerins et les cueilleurs de champignons qui sont de sortie. 

À l’entrée de Saint Sauvant, en face du cimetière communal, entouré de hauts murs et protégé par une grille rouillée, un cimetière familial protestant. J’ignorais que cela existait.
J’ai l’impression de découvrir un village fantôme. Pas âme qui vive. Pourtant c’est ici que tous les hébergements affichent complet.
Je quitte donc Saint Sauvant à la sauvette et je continue mon chemin, rude et solitaire.
Ma seule rencontre de cette après-midi :
Une mante religieuse.
C’est la journée du patrimoine en France, l’église de Chenay est exceptionnellement visitable aujourd’hui. Alors je vais encore vous infliger un édifice religieux, d’autant plus qu’il n’y a rien d’autre à voir ici.
29